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Le secteur agricole est important en Afrique. C’est
un secteur dominant en termes d’emploi, de recettes
d’exportation et de moyens de subsistance pour
une bonne partie de la population. Il représente
plus de 20 % du PIB de l’Afrique (AFDB, 2016). Malgré
cela, l’Afrique reste un importateur net de denrées
alimentaires. Cette tendance risque de perdurer,
car le secteur agricole du continent fait face à des
défis considérables, notamment en raison des effets
néfastes du changement climatique. La structure
du système de production alimentaire africain est
caractérisée par une grande majorité d’agriculteurs
exerçant des activités agricoles à double fin – produc-
tion alimentaire pour la consommation domestique
et pour la vente sur le marché. L’agriculture com-
merciale est également florissante pour certaines
cultures.
Les semences sont essentielles à la production alimen-
taire et les lois sur les semences couvrent un large
éventail d’activités. Ces activités comprennent les tests
des semences, la certification, l’homologation et l’enre-
gistrement des variétés, les mesures phytosanitaires et
les droits des obtenteurs (la protection des variétés végé-
tales). La manière dont chacune de ces activités est régle-
mentée par la loi a un effet significatif sur la production,
la disponibilité et l’accessibilité des semences et donc sur
la structure des systèmes agricoles. Pour l’Afrique, les
lois sur les semences doivent également s’adapter aux
spécificités et au contexte unique des petits agriculteurs.
Ce rapport passe en revue le statut actuel des lois sur les
semences au niveau international, au niveau continental
en Afrique, dans l’UE, aux États-Unis ainsi que les pro-
grammes internationaux en rapport avec les lois sur les
semences en Afrique. L’examen des lois de l’UE est basé
sur le fait que l’UE est un partenaire commercial clé pour
les pays africains et les blocs économiques régionaux et
que les développements de la politique de l’UE tels que
le Pacte vert pour l’Europe (PVE) sont susceptibles d’avoir
un impact sur les lois semencières dans l’UE et ailleurs.
Les lois américaines sur les semences et les programmes
américains sur les semences en Afrique sont brièvement
passés en revue afin de souligner les actions d’acteurs
extérieurs qui influencent les lois sur les semences en
Afrique. Ce rapport passe également en revue les débats
relatifs à ces lois. Ces débats portent en particulier sur
les droits des agriculteurs à conserver, réutiliser, échan-
ger ou vendre des semences de ferme1. La conservation,
la réutilisation, l’échange ou la vente de semences de
ferme est non seulement une pratique que les agricul-
1. En tant que terme juridique, les « semences de ferme » désignent les semences et
le matériel de multiplication de variétés protégées qu’un agriculteur conserve de sa
propre récolte pour les planter. C’est dans ce contexte que ce terme est utilisé dans
ce rapport.
teurs, surtout en Afrique, utilisent depuis longtemps
comme stratégie pour surmonter le problème de l’accès
aux semences, mais elle est également reconnue comme
un droit des agriculteurs au niveau international. Cette
pratique a contribué grandement à la conservation des
ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agri-
culture. En outre, le rapport examine dans quelle mesure
les agriculteurs africains participent aux processus de
formulation des politiques semencières, en soulignant
que cette participation est nécessaire pour que les lois,
politiques et programmes relatifs aux semences soient
pertinents, efficaces et durables.
La promotion de systèmes alimentaires agroécologiques,
sains et abordables en Afrique ne peut être réalisée sans
la participation des agriculteurs aux processus d’élabora-
tion des politiques semencières. Ces politiques com-
prennent notamment les aspects relatifs au maintien des
droits des agriculteurs à conserver, utiliser et échanger
les semences de ferme et les cultures de variétés pro-
tégées mais aussi locales. Il existe un large éventail de
traités, d’instruments et de politiques qui réglementent
les lois sur les semences au niveau international, et en
Afrique au niveau continental régional et national. Ce
document examine les traités, instruments et politiques
au niveau international, continental et régional et tente
d’identifier les activités que la DG INTPA F3 pourrait
soutenir pour préserver et promouvoir les droits des
agriculteurs. En effet, certains des traités existants
reconnaissent les droits des agriculteurs ou sont conçus
de manière à permettre l’exercice de ces droits, alors que
d’autres ne le font pas du tout. Un aperçu de ces traités
est présenté ci-dessous (Illustration 1).
Des travailleurs
remplissent
des sacs de semences
de riz dans l’usine
SEMOC pour
le traitement de
semences.
© FAO/Paballo Thekiso
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DeSIRA-LIFT Évolution actuelle de l’harmonisation des lois sur les semences en Afrique
Résumé exécutif
Illustration 1. Reconnaissance des droits des agriculteurs dans les traités et instruments relatifs aux semences et à la sélection végétale
Traités et instruments reconnaissant les droits
des agriculteurs en Afrique
• UPOV (1978)
•  Traité international sur les ressources
phytogénétiques (2001)
•  Système harmonisé de réglementation des
semences de la CDAA (2013)
•  Cadre réglementaire semencier de la
CEDEAO-UEMOA-CILSS (2014)
• Protocole d’Arusha sur la POV (2015)
• Protocole de la CDAA sur la POV (2017)
Traités et instruments ne reconnaissant
pas les droits des agriculteurs en Afrique
• UPOV (1991)
• Accord de l’OMC sur les ADPIC (1995)
•  Règlement sur l’harmonisation des
semences du COMESA (2014)
• Annexe X de l’Accord de Bangui (2015)
•  Projet de protocole de la ZLECAf sur les
droits de propriété intellectuelle (2022)
Le rapport constate que les discussions internationales
sur la manière dont les droits des agriculteurs devraient
être appliqués au niveau national se poursuivent dans le
cadre du Traité international sur les ressources phyto-
génétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA),
malgré les dispositions de ce traité. De même, la défini-
tion des actes qui sont privés et non commerciaux en ce
qui concerne les exemptions aux droits des obtenteurs,
et la manière dont un agriculteur peut conserver des
semences sur sa propre exploitation, tout en prenant
soin des intérêts légitimes d’un titulaire d’un certificat
d’obtention végétale, restent des questions litigieuses
au sein de l’Union internationale pour la protection des
obtentions végétales (UPOV). En Afrique, les instruments
continentaux et régionaux sont en désaccord entre eux
sur la manière de trouver un équilibre entre les droits
des agriculteurs et les droits des détenteurs de POV. La
ZLECAf suit le modèle UPOV 1991, le modèle UPOV 1978
n’étant pas disponible pour de nouvelles signatures. Les
lignes directives de l’Union africaine pour l’harmonisa-
tion des cadres réglementaires des semences en Afrique
mentionnent les droits des agriculteurs, mais ne donnent
pas de détails sur la manière dont ils peuvent être exer-
cés. En revanche, le Protocole d’Arusha prend explicite-
ment en compte les droits des agriculteurs en élargissant
les dispositions relatives aux privilèges des agriculteurs.
La cohérence des politiques est nécessaire, étant donné
que le niveau d’adoption et d’application de ces diffé-
rents instruments est variable. Parallèlement, l’UE a une
longue expérience en ce qui concerne l’équilibre entre
les droits des obtenteurs et ceux des petits exploitants
agricoles, et cette expérience peut être transférée sur
le continent africain où la cohérence des politiques est
nécessaire.
En ce qui concerne les essais de semences, la certifica-
tion, l’enregistrement et l’homologation variétale, les
politiques africaines sont incohérentes. Alors que des
organismes régionaux comme la CEDEAO et la CDAA
prévoient un système de reconnaissance des variétés
locales dans leurs programmes de semences, le COMESA
ne le fait pas. Dans l’UE, des mécanismes de conserva-
tion de variétés locales sont spécifiquement prévus. En
s’appuyant sur l’expérience de l’UE, les variétés locales et
les variétés similaires devraient être prises en compte de
manière uniforme dans les programmes régionaux de
semences en Afrique. Il convient d’explorer les possibili-
tés en Afrique d’avoir un système à l’échelle du continent
qui reconnaisse officiellement les variétés locales. Un tel
système pourrait inclure des éléments tels que des dis-
positions sur le champ d’application des régimes pour les
variétés locales et les variétés de conservation, ainsi que
les zones agroécologiques où elles sont cultivées.
Quant à la question de la participation des agriculteurs
africains et de leurs organisations aux processus d’éla-
boration des politiques semencières, le présent rapport
constate que l’UA dispose d’une structure institutionnelle
élaborée au niveau de la Commission pour prendre en
compte les points de vue des acteurs non gouvernemen-
taux. Cependant, il semble que cette structure n’est pas
exploitée de manière satisfaisante, que ce soit par l’UA
ou par les acteurs non gouvernementaux. Les organisa-
tions paysannes devraient mieux utiliser cette structure
au sein de l’UA pour faire connaître leurs points de vue.
En outre, pour les blocs commerciaux régionaux et les
organisations de propriété intellectuelle, des efforts
délibérés et volontaires doivent être déployés pour
étendre leur champ d’action pour recueillir les avis des
groupes d’agriculteurs, des organisations de la société
civile et des acteurs non gouvernementaux. Il faudrait
mettre en place des mécanismes, et les faire connaître
des politiques, précisant la manière dont les acteurs de
la société civile peuvent s’engager auprès des institutions
en charge des politiques semencières. En revanche,
les organisations de la société civile (les organisations
d’agriculteurs et d’autres acteurs non gouvernementaux)
ont besoin du soutien d’institutions continentales telles
que la Commission de l’UA et d’autres instances, car les
groupes qu’ils représentent – les petits exploitants agri-
coles – ne peuvent guère les soutenir financièrement. Les
programmes de l’UE qui aident les acteurs non-gouver-
nementaux pourraient être étendus aux organisations
d’agriculteurs en Afrique. Ces programmes de soutien
aux organisations de la société civile peuvent être en-
visagés sous l’angle de la mise en œuvre des droits des
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DeSIRA-LIFT Évolution actuelle de l’harmonisation des lois sur les semences en Afrique
Résumé exécutif
agriculteurs dans le cadre du traité TIRPAA et des cadres
internationaux relatifs aux droits humains, notamment le
droit à l’alimentation.
Dans l’ensemble, l’UE et les États membres sont en
position d’aider l’Afrique à trouver un équilibre entre
les droits des agriculteurs et les droits des détenteurs
de POV. Cet équilibre contribuera grandement à déve-
lopper une approche agroécologique de la production
alimentaire en Afrique, dans l’UE et dans le monde. Les
pays africains qui sont membres du traité TIRPAA et qui
adhèrent de plus en plus à l’UPOV 1991 ( les deux cadres
juridiques de base sur les questions relatives aux droits
des agriculteurs), pourraient s’associer avec l’UE pour
trouver cet équilibre. Le soutien de la participation des
organisations d’agriculteurs aux processus d’élaboration
des politiques semencières est un élément essentiel
pour atteindre cet équilibre et pour concrétiser les droits
des agriculteurs. C’est un axe d’intervention que la DG
INTPA pourrait reprendre et soutenir dans le cadre de
ses programmes de partenariat international et de poli-
tique de développement.
Enfin, la ZLECAf, les blocs économiques africains régio-
naux et les institutions de propriété intellectuelle ont
besoin de soutien pour harmoniser les différentes lois
et politiques existantes en matière de semences. Toutes
ces lois et politiques doivent être destinées à favoriser, et
non à entraver, la production alimentaire en Afrique. Les
institutions européennes peuvent jouer un rôle influent à
cet égard en proposant aux pays africains qu’ils adhèrent
à une nouvelle réglementation sur les semences alignée
sur celles développées en Europe avec ces mécanismes
de protection des droits des agriculteurs et préservation
des variétés locales. Cela ne signifie pas nécessairement
que la mise en œuvre de l’UPOV 1991 devrait priver les
agriculteurs de leurs droits à conserver, utiliser, vendre
et échanger les semences protégées. Dans tous les cas,
il devrait être clair, dans tous les instruments relatifs aux
lois sur les semences en cours de mise en place, que les
droits accordés aux variétés locales sont différents et
distincts de ceux accordés aux variétés protégées.
Des sacs sont remplis de semences lors
d’une distribution de
semences en Éthiopie effectuée par la FAO.
© FAO/Michael Tewelde
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Categories: Study Reports

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